L'étrange stratégie d'Apple avec les iPad 2025

Nadim Lefebvre
Il y a 10 heures (Màj il y a 1 heure)
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iPad Air

Apple vient de dévoiler deux nouveaux modèles d'iPad qui suscitent autant d'intérêt que d'interrogations. D'un côté, l'iPad Air M3 arrive moins d'un an après son prédécesseur avec une simple mise à jour de puce, et de l'autre, l'iPad A16 remplace enfin un modèle vieux de trois ans mais fait l'impasse sur Apple Intelligence. Ces lancements, qui interviennent en dehors du calendrier habituel de la marque à la pomme, reflètent une stratégie commerciale qui mérite d'être analysée. Examinons de plus près ces nouveaux venus dans l'écosystème Apple et tentons de comprendre les motivations derrière ces choix étonnants.

Pourquoi sortir l'iPad Air M3 maintenant ?

Moins d'un an après le lancement de l'iPad Air M2 — simultanément à l'iPad Pro M4 — Apple dote son modèle milieu de gamme d'une mise à jour de puce. Alors qu'elle semblait empressée d'abandonner la M3 sur le MacBook Pro, elle s'empresse de l'intégrer à l'iPad Air. Cette décision est d'autant plus déconcertante qu'Apple avait tout fait pour retirer rapidement la M3 du MacBook Pro, face à une production complexe et coûteuse.

Si le choix de la puce est discutable, la M3 demeure incontestablement une amélioration par rapport à la M2. Le point critique réside dans le calendrier choisi par Apple. L'iPad Air M2 est sorti en mai 2024, il y a seulement 10 mois, et le voilà déjà renouvelé. Cette précipitation est surprenante, d'autant plus que Cupertino semblait vouloir allonger les cycles des iPad au profit de mises à jour majeures. D'autant que l'iPad Air M2 n'avait pas réellement besoin de nouveautés et remplissait parfaitement sa fonction. Pour preuve, la version M3 n'apporte rien de nouveau hormis sa puce. Dès lors, on peut s'interroger sur les motivations d'Apple pour sortir cet iPad Air M3.

Plusieurs hypothèses sont envisageables. La plus simple serait que l'iPad Air M2 connaissait des ventes décevantes, incitant Apple à vouloir dynamiser sa tablette. Cette supposition est cependant peu probable au vu des résultats financiers et du timing ; lorsqu'un produit se vend mal, l'entreprise a généralement tendance soit à le retirer du marché, soit à le maintenir en vente sur une très longue période.

Une autre hypothèse, plus contextuelle, est liée à la situation politique aux États-Unis. Il est de notoriété publique que l'administration Trump envisage d'appliquer des tarifs douaniers sur les produits importés de plusieurs pays, dont la Chine, où est fabriquée la majorité des produits Apple. Pour anticiper ces taxes, il est possible qu'Apple ait constitué d'importants stocks aux États-Unis et se soit vue contrainte d'annoncer ces produits précipitamment. Bien que ce soit une stratégie à court terme, qui ne peut être viable que temporairement, c'est l'hypothèse la plus plausible.

Quoi qu'il en soit, l'iPad Air M3 n'est pas un mauvais produit en soi, mais son lancement sème le doute. En tout cas, le fait qu'il faille trouver des explications au-delà de la logique technologique ou commerciale prouve qu'on est face à une étrangeté de la part d'Apple.

L'iPad A16 est trop ennuyeux

Ne l'appelez pas iPad 11e génération, mais bien A16. S'il y a bien une décision judicieuse qu'a prise Apple c'est d'avoir enterré le naming par génération au profit du nom des puces, à l'instar des Mac. Malheureusement, c'est tout ce qu'il y a à retirer de cet iPad.

L'iPad A16 est le seul produit du catalogue 2025 à ne pas être compatible avec Apple Intelligence. Les Mac entrée de gamme le sont, l'iPhone 16e l'est et même l'iPad mini 7. C'est d'autant plus étonnant qu'Apple semble vouloir démocratiser la technologie coûte que coûte, en ayant même sorti un nouveau modèle d'iPhone abordable taillé pour. Alors comment expliquer ce manquement à l'iPad A16 ? Honnêtement, on ne peut pas.

Contrairement à l'iPad Air, il fallait renouveler l'iPad entrée de gamme après trois longues années, mais Apple a fait le service minimum. L'entreprise aurait pu garder au catalogue les deux iPad, A14 et A16, pour créer une véritable segmentation avec un modèle véritablement peu onéreux. Une telle stratégie a déjà été menée : les iPad 9 et 10 ont cohabité dans la gamme. Apple aurait également pu attendre une ou deux années pour intégrer l'A17 Pro sans sacrifier ses marges, pour rendre l'appareil compatible avec Apple Intelligence et garder une cohérence. Là, à plus de 400€, on ne peut conseiller l'iPad A16 à personne et il sera toujours plus rentable de se tourner vers un A14 bien moins cher et qui ne posera aucun problème pour des usages légers.

Sur la question d'Apple Intelligence dans l'iPad A16, Mark Gurman explique la stratégie d'Apple dans sa dernière newsletter :

L'absence d'Apple Intelligence s'explique par le manque de mémoire et d'autres composants nécessaires pour exécuter des modèles d'IA en local. C'est l'un des inconvénients évidents d'Apple Intelligence, qui met en lumière l'avantage des systèmes concurrents s'appuyant presque entièrement sur le cloud. Étant donné l'importance de l'IA pour l'avenir d'Apple, je m'attendais personnellement à ce que l'entreprise rende l'iPad suffisamment puissant pour exécuter ce logiciel (ce qui aurait nécessité 8 Go de mémoire et une puce A17 Pro). Mais Apple a pris une autre direction, préférant utiliser des composants moins coûteux afin de maintenir un prix plus abordable pour l'appareil. L'avantage pour Apple, c'est qu'elle peut utiliser ces fonctionnalités d'IA pour inciter les clients à opter pour les modèles Air, plus onéreux. Mais cela ne fonctionnera que si Apple Intelligence devient un argument de vente convaincant. Pour l’instant, ce n’est tout simplement pas un atout légitime.

Soyons clairs : on ne dit pas qu'Apple Intelligence est formidable ou qu'il faut absolument l'avoir sur son iPad, là n'est pas le sujet. Simplement, le fait de rendre compatibles tous les produits sauf l'iPad A16 nous interroge fortement sur la stratégie d'Apple.

L'iPad A16 se vendra bien, notamment parce qu'il est destiné au marché de l'éducation et qu'il s'agit tout simplement de l'iPad le moins cher. Le manque d'Apple Intelligence ne se fera pas ressentir tout de suite, sachant que les fonctionnalités sont sans cesse repoussées et pour le moment limitées... mais il n'est pas recommandable pour autant sachant qu'Apple vend également l'iPad Air M1 à 450€ sur son refurb.

Le moins qu'on puisse dire est qu'Apple a fait des choix étonnants sur les renouvellements d'iPad. Entre renouvellement trop rapide sur l'iPad Air M3 et trop limité sur l'iPad A16, difficile de trouver son bonheur parmi les choix proposés. Heureusement qu'Apple choie beaucoup plus les Mac avec un excellent MacBook Air M4 qui, lui, se paye même le luxe de baisser de prix. Deux poids deux mesures.

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