La taxe sur les colis chinois approuvée en France pour 2026 (Temu, Shein, Aliexpress)
Nadim Lefebvre
- Il y a 7 heures
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Chaque année, des centaines de millions de colis, principalement issus des géants du e-commerce chinois comme Shein, Temu ou AliExpress, atterrissent dans les boîtes aux lettres françaises. Leur succès fulgurant interroge, tant sur l’équité fiscale que sur l’impact écologique et la sécurité des consommateurs. Face à ce raz-de-marée, le gouvernement français affiche sa détermination à mieux encadrer ces envois et à en limiter certains effets pervers… quitte à les rendre plus coûteux à l’avenir.
Pourquoi la France veut taxer les petits colis chinois
Aujourd’hui, un colis d’une valeur inférieure à 150 euros expédié depuis la Chine échappe à la plupart des droits de douane. Cette exemption, instaurée au nom de la « fluidité douanière », a favorisé l’essor de plateformes de fast fashion et de gadgets à très bas prix, au détriment des commerces locaux. Conséquence : selon Bercy, plus de 800 millions de petits colis de ce type ont été livrés en France rien qu’en 2024, soit déjà plus de la moitié du volume total des envois.
Le phénomène inquiète sur plusieurs plans : concurrence jugée déloyale par les commerçants traditionnels, bilan carbone jugé « catastrophique » — un avion-cargo émet 100 fois plus qu’un transport maritime selon l’ADEME —, et risques pour les consommateurs puisque bon nombre de ces produits ne respectent pas les normes européennes. Récemment, la filière du jouet européenne pointait que 8 articles sur 10, piochés sur ces marketplaces, s’avèrent non conformes ou même dangereux.
Dans ce contexte, le ministre de l’Économie, Éric Lombard, et la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, veulent introduire, dès 2026, des « frais de gestion » — quelques euros par colis — appliqués aux importateurs et plateformes, pour financer le renforcement des contrôles douaniers et de sécurité. L’objectif est clairement de responsabiliser les géants du e-commerce, sans toucher directement les consommateurs… du moins en théorie, car rien n’exclut que ces coûts soient répercutés sur les prix.

Une Europe à la traîne… mais qui accélère
Si la France s’active, elle souhaite avant tout entraîner l’Union européenne dans son sillage. Car agir seule serait inefficace : « Si nous appliquons ces mesures uniquement en France, les flux iront ailleurs », admet Éric Lombard. Avec 91 % des petits colis (valeur <150 €) provenant de Chine selon les douanes européennes, la problématique est continentale. D’ailleurs, Bruxelles planche déjà sur une réforme douanière globale, qui supprimerait l’exonération d’ici 2028. Mais la France milite pour avancer la mise en œuvre dès 2026, de concert avec d’autres pays comme les Pays-Bas, principaux points d’entrée maritime de ces colis.
En parallèle, la Commission européenne enquête sur Shein et Temu pour manque de transparence et vente de produits non conformes aux normes de sécurité. D'autres sujets inquiètent, comme l'utilisation des données des européens et leur extraction vers des serveurs chinois opaques. Autant de signaux forts d’un changement de cap dans la régulation de la fast fashion importée.
Avec les droits de douane imposés par l'administration Trump sur les produits chinois, les autorités européennes anticipent un déferlement de gadgets et de vêtements cheap au sein du continent pour compenser. Pas sûr que ces frais de "quelques euros" sur chacun des colis dissuade qui que ce soit de passer à l'achat, et cela risque de faire augmenter la facture pour tout le monde.
En somme, la taxation des petits colis chinois, réclamée de longue date par de nombreux professionnels du commerce, illustre une volonté de réguler un modèle économique devenu, pour beaucoup, incontrôlable. Reste à voir si l’Europe saura tenir la cadence face à l’innovation logistique des géants du e-commerce… et à la tentation, toujours très forte, de la mode et des gadgets à petits prix.