Pourquoi une transition vers Apple Silicon et non ARM
- 👨 Alban Martin
- Il y a 4 ans (Màj il y a 4 ans)
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Apple Silicon : mieux que ARM ?
Vous le savez peut-être, Apple a repris la puce A12Z de son dernier iPad Pro 2020 comme processeur Apple Silicon de première génération inclus dans le kit de transition pour développeur. Le Mac mini livré aux développeurs incorpore donc des cœurs de CPU signé ARM. Mais Apple n'en parle pas. Apple a plutôt évoqué son propre silicium personnalisé comme étant un «SoC» ou un système sur puce.
Au cours de la dernière décennie, Apple a développé une série de SoC qui incorporent essentiellement une carte logique entière de puces qui peut être produite en masse et utilisée sur plusieurs appareils, de l'iPhone à l'iPad en passant par l'Apple TV et même le HomePod.
Apple Silicon est le nom collectif des processeurs système sur puce conçus par Apple Inc. utilisant l'architecture ARM.
ARM est partout chez Apple
Le principal avantage de cette intégration était la consommation d'énergie. ARM a produit des processeurs sous licence qui ont fourni les meilleures performances de calcul par watt, ce qui a conduit Apple à faire d'ARM le point central de ses conceptions de SoC. Les cœurs ARM sont également la base des composants Apple de la série M qui surveillent les données de l'accéléromètre, du gyroscope et du baromètre pour suivre efficacement les mouvements d'un appareil.
Les modems fournis par Qualcomm pour gérer la connectivité aux réseaux mobiles intègrent également un cœur de processeur ARM, mais la plus grande partie de la valeur de ces puces provient de l'ensemble complet de composants et de logiciels propriétaires qui permettent des performances de débit et de consommation.
Apple utilise ARM comme il l'a fait pour Unix
À certains égards, l'utilisation par Apple des cœurs ARM dans ses SoC est similaire à son utilisation d'Unix dans le système d'exploitation macOS. Les deux sont effectivement des spécifications qui standardisent les opérations des couches technologiques de bas niveau. De la même manière que les Mac sont plus que de simples systèmes Unix, les SoC d'Apple sont plus que de simples processeurs ARM.
Apple Silicon a plus de valeur que ARM
Comme avec les modems de Qualcomm, les personnalisations, les optimisations et les couches supplémentaires de travail propriétaire qu'Apple ajoute à ses SoC de la série A se traduisent par un produit fini beaucoup plus précieux que les composants de base. Une réalité qu'on retrouve chaque année dans les benchmarks qui placent les puces AXX d'Apple devant les autres SoC basés sur ARM développés par Qualcomm, Nvidia, et autre Samsung.
Apple a listé une série de fonctionnalités de ses SoC en silicium personnalisés qui amélioreront les futurs Mac. Mais parmi eux, la firme n'a même pas cité le coeur ARM lui-même. La plupart des avantages qu'Apple a mis en évidence lors du passage à son propre silicium se rapportaient à des caractéristiques uniques développées sur mesure pour ses SoC.
Ceux-ci incluent le traitement audio à haute efficacité, la lecture vidéo à faible puissance, la gestion avancée de l'alimentation, un contrôleur de stockage haute performance, des accélérateurs d'apprentissage automatique, le Secure Enclave, un contrôleur de performance, un processeur de caméra de haute qualité, une accélération de la cryptographie, le Neural Engine, le GPU d'Apple et une architecture de mémoire unifiée.
Cela va permettre de répondre à des besoins de plus en plus puissants des utilisateurs Mac pour le calcul 3D, le machine-learning et autre traitement de l'image et du son. Mais cela va aussi améliorer certains composants des Mac comme la webcam, souvent critiquée pour sa piètre qualité. Avec Apple Silicon, on peut imaginer le même type de fonctionnalités guidés par l'IA qu'on retrouve sur les derniers iPhone 11 avec le mode nuit, Deep Fusion, etc.
Autre point clé : la puce GPU d'Apple qui utilise une faible mémoire optimisée, comme la Sega Dreamcast à son époque par exemple. Quand on voit les performances d'une puce A12X ou A12Z sur iPad Pro avec des jeux en 120 Hz, on se dit qu'Apple pourrait aller plus loin sur Apple Arcade et attirer les éditeurs de gros jeux sur Mac. D'autant que son architecture maison sera encore plus optimisée pour Metal, son API dédié aux jeux sur iOS, iPadOS, tvOS et MacOS.
Dernier exemple fourni par Apple, la connectivité SideCar sera de meilleure qualité avec les iPads grâce à ses propres puces. Le SoC est plus performant pour traiter les données chiffrées.
Ces exemples ne sont pas des fonctionnalités générales concédées sous licence à Apple par ARM - ce sont des travaux de silicium personnalisés développés chez Apple.
Les processeurs Intel x86 Core intègrent également leurs propres versions propriétaires de certaines de ces fonctionnalités, y compris le propre GPU intégré de l'entreprise et la logique de gestion des supports. Le désir d'Apple de passer du package d'Intel pour le remplacer par sa propre conception indique clairement qu'Apple pense que son propre silicium est meilleur, et surtout que son intégration logicielle est fin prête. Avec tout le travail fourni sur iOS, il est temps de partager le savoir-faire avec le Mac.
Ainsi, Apple ne passe pas simplement arbitrairement de «x86 à ARM», mais utilise plutôt son travail de silicium personnalisé pour améliorer les performances, les fonctionnalités et l'intégration approfondie de ses Mac. Le passage à ARM est en quelque sorte un effet secondaire de la volonté d'Apple d'utiliser son propre silicium personnalisé. Jusqu'à présent, Apple s'est limité à ajouter une puce d'assistance comme le T2 à ses Mac Intel pour gérer des fonctionnalités personnalisées telles que Touch ID et Touch Bar.
On ne peut donc pas dire qu'Apple "passe à ARM", car la véritable transition qu'Apple fait en déplaçant le Mac vers ses propres SoC implique de tirer parti du travail qu'il a déjà fait pour faire de son Apple Silicon un leader du secteur.
La motivation d'Apple n'est pas comme le passage de Microsoft à ARM
Les motivations d'Apple pour macOS ne sont pas les mêmes que celles de Microsoft pour Windows. MacOS ne passe pas à ARM, car il ne fonctionnera pas sur un Raspberry Pi ou un Qualcomm 8cx "toujours sur" un PC conçu pour exécuter "Windows 10 sur ARM". Il utilise ARM pour aller plus loin, là où Microsoft propose Windows 10 sur ARM pour porter son système sur des objets connectés de faible puissance. Mais il ne remplace pas Intel, il l'accompagne.
Apple veut garder le contrôle de macOS sur Mac. On ne verra pas le système d'exploitation sur un autre ordinateur (hors hackintosh) et tout le travail fourni vise à améliorer les performances, à faciliter la réutilisation du code des développeurs et à faire converger l'écosystème Apple. Le tout profitant au final au porte-monnaie. Apple va faire des économies à grande échelle sur la durée.
Les autres motivations du changement
Le passage d'Apple aux Mac Intel en 2006 était un effort pour réaliser des économies d'échelle dans l'industrie du PC qui favorisaient alors Windows et Intel, face au "petit" PowerPC de IBM. Mais depuis, les ventes stagnent et c'est en partie du aux performances des puces Apple dans les smartphones et les tablettes, mais aussi de ses concurrents.
Depuis plus de dix ans, le développement par Apple d'une plateforme mobile largement adoptée par les clients a entraîné des revenus colossaux pour la firme qui ont non seulement aidé à financer des avancées sophistiquées dans le silicium personnalisé, mais également la progression rapide des systèmes d'exploitation d'Apple, des outils de développement, de ses applications propriétaires et de son écosystème App Store.
De plus, il existe un autre développement important qui a poussé vers Apple Silicon : la fabrication de puces avancée chez TSMC. Alors qu'Intel a du mal à améliorer considérablement ses conceptions de processeurs et son processus de fabrication de puces, le partenaire de fabrication de puces d'Apple TSMC a réalisé des progrès constants, notamment sur la finesse de gravure. Intel vient de passer à 10nm alors que TSMC s'attaque au 5nm.
Le résultat est que les SoC d'Apple bénéficient d'une efficacité de production qui les rend plus petites, plus rapides, plus efficaces et moins chères à produire. Les USA ont d'ailleurs attiré TSMC sur le sol américain, histoire d'éloigner la firme le plus possible de Huawei pour qui elle produit aussi des CPU.
Une dépendance ARM embêtante ?
Malgré tout, tout miser sur peut être dangereux. En effet, ARM pourrait apporter des problèmes similaires à ceux de TSMC car il est désormais majoritairement détenu par des intérêts chinois. Pour cette raison, Apple doit en outre rechercher des alternatives à la propriété intellectuelle d'ARM. Apple pourrait probablement poursuivre le même type d'indépendance vis-à-vis des conceptions de référence ARM que celui démontré avec Imagination Technologies. Apple a fini par développer un GPU personnalisé avec une dépendance de licence réduite à la société en question. S'il fait la même chose en ce qui concerne ARM, nous pourrions éventuellement voir émerger un "processeur Apple" personnalisé dans le futur Apple Silicon.