Epic Games a obtenu des témoignages accablants contre Apple
- 👨 Julien Russo
- Il y a 4 ans (Màj il y a 4 ans)
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Les témoignages d'Epic Games à quelques jours du procès
Le combat Apple VS Epic Games s'annonce être le procès de l'année, les deux entreprises ont préparé une attaque en béton avec les témoignages de plusieurs de leurs dirigeants, mais aussi des témoignages de professeurs de grandes universités.
Nous avons pu voir hier en avant-première les témoignages que présentera Apple lors du procès qui commencera le 3 mai, aujourd'hui ce sont les témoignages obtenus par Epic Games qui viennent d'être mis en ligne.
Comme Apple, Epic a choisi des personnes stratégiques pour son attaque, des personnes qui connaissent à la perfection le sujet et qui ont une expérience de plusieurs années dans le domaine de l'économie, de la sécurité, du droit ou encore des pratiques anticoncurrentielles.
Si les témoignages d'Apple étaient plutôt convaincants, ceux d'Epic Games le sont tout autant.
Le créateur du Battle Royale a fait appel à :
- Susan Athey, professeure d'économie de technologie à Stanford
- Dr David Evans de l'Université College de Londres (UCL)
- Wenke Lee, professeur à l'Institut de technologie de Géorgie
- Dr Michael Cragg de la société de conseil économique The Brattle Group.
Tous les témoignages sont évidemment à 100% en faveur d'Epic Games et visent chacun les pratiques inacceptables d'Apple avec l'App Store, celles que dénoncent Epic Games, Spotify et de nombreuses autres sociétés à travers le monde.
On commence avec le Dr David Evans de l'Université College de Londres. L'homme a répondu aux personnes qui disent qu'un utilisateur est libre du choix qu'il fait dans le smartphone qu'il souhaite acquérir, personne n'est obligé de prendre un iPhone et chacun peut se tourner vers un smartphone sous Android.
Evans ne conteste pas cette déclaration, mais il rappelle tout de même que commencer avec un iPhone vous met dans une position délicate quand vous souhaitez aller de l'autre côté :
Les utilisateurs d'iOS et d'Android font des investissements à moindre coût dans le matériel, les logiciels et l'apprentissage pour leurs écosystèmes respectifs. Une décision de changer d'OS est une décision de déplacer les écosystèmes, ce qui signifie que les consommateurs perdraient la valeur de ces investissements et devraient en faire de nouveaux. Ces coûts réduisent l'incitation des consommateurs à changer.
En effet, s'il est possible de transférer les contacts, photos, vidéos et autres données personnelles vers Android, il n'est pas encore possible de transférer des applications qu'on a payées sur l'App Store ou encore des contenus achetés sur l'iTunes Store. Sur ce coup-là, le Dr David Evans a entièrement raison !
Autre point accablant mis en avant dans ce témoignage, c'est l'exemple macOS. Apple a mis en place un Mac App Store il y a quelques années, cependant les comportements des développeurs sont clairement en défaveur de la boutique d'applications, beaucoup choisissent de proposer leur application macOS sur leur site web directement pour éviter d'avoir les contraintes du Mac App Store (commission, transparence de confidentialité, contenus interdits...) :
D'après une enquête menée auprès des principales applications Windows et Mac en 2020, j'ai constaté qu'elles distribuaient toutes leurs logiciels sur plusieurs magasins d'applications et par téléchargements directs. Une enquête a révélé que 78 % des développeurs macOS distribuaient leurs applications par d'autres canaux que le Mac App Store.
Evans démontre clairement que quand une autre solution que l'App Store est proposée, cela semble mieux convenir aux développeurs !
Pour enterrer encore plus le géant californien, Evans explique dans son témoignage qu'Apple utilise ouvertement des pratiques anticoncurrentielles pour améliorer la visibilité de ses propres services au détriment des autres. On pense immédiatement à Spotify et Apple Music...
Apple peut utiliser les fonctionnalités de recherche et de découverte de l'App Store pour avantager ses propres applications et désavantager celles de ses rivaux - une pratique connue sous le nom d'"auto-préfférence" - y compris refuser de promouvoir des applications concurrentes. Il y a des preuves dans le dossier de découverte [...] qu'Apple a utilisé l'auto-référencement pour désavantager les applications rivales dans l'App Store.
Pour le second témoignage, Epic Games s'est rapproché d'une grande professeure d'économie de technologie de Stanford. Susan Athey a une réputation extraordinaire aux États-Unis, c'est d'ailleurs la 1ère femme lauréate de la médaille John Bates Clark. Athey s'est intéressé à l'argument que met toujours en avant Apple : "si nous proposons que l'App Store et que nous n'ouvrons pas la porte à un store tiers, c'est pour la sécurité des utilisateurs".
Selon la professeure, c'est une fausse excuse pour éliminer la concurrence :
Mon avis d'expert est que la sécurité de l'iPhone est en fait largement indépendante du processus d'examen et du canal de distribution (quelle que soit la manière dont ils sont mis en œuvre). Apple exagère considérablement les avantages en matière de sécurité de son modèle d'App Store centralisé. Apple a raison de se préoccuper de la sécurité de ses utilisateurs ; cependant, les garanties de sécurité d'un iPhone sont principalement appliquées par le système d'exploitation de l'iPhone, et non par l'App Store d'Apple et le processus d'évaluation associé.
L'avant-dernier témoignage nous vient de Wenke Lee de l'Institut de technologie de Géorgie, l'homme explique qu'avant de donner cette déclaration en faveur d'Epic Games, il a longuement étudié le modèle de sécurité d'iOS. Lui aussi rejoint complètement l'avis de Susan Athey, il donne même une solution que pourrait exploiter Apple :
J'ai évalué le modèle de sécurité d'iOS en me basant sur les objectifs et les processus déclarés par Apple pour faire respecter la sécurité sur iOS. Mon analyse m'a amené à conclure que [...] les mêmes caractéristiques de sécurité qu'Apple cherche à appliquer sur iOS peuvent être obtenues sans qu'une distribution exclusive soit nécessaire. Par exemple, des tiers pourraient effectuer les mêmes étapes de vérification de la sécurité que celles qui sont prises pendant l'examen des applications. Les tiers peuvent également procéder à la vérification de l'identité des développeurs et à la signature du code. Plus important encore, tous les mécanismes sur l'appareil qui renforcent la sécurité sur iOS sont indépendants du modèle de distribution des applications.
Le dernier témoignage est court, mais efficace. Le Dr Michael Cragg de la société de conseil économique The Brattle Group a répondu à l'une des récentes déclarations d'Apple. Pour rappel, la firme de Cupertino affirmait que les développeurs étaient libres de proposer leurs applications sur d'autres plateformes si les conditions de l'App Store ne leur convenaient pas.
Une manière simple de dire : "nous vous invitons à aller voir ailleurs si vous n'acceptez pas nos règles". Selon Cragg, Apple ne se rend pas compte que pour un développeur, iOS est très important pour élargir son public en plus d'Android :
Les développeurs sont fortement tributaires des recettes de l'App Store, et Apple dispose d'un pouvoir de négociation nettement supérieur à celui de tout développeur individuel. En conséquence, les experts d'Apple ont tort de prétendre que les développeurs peuvent changer de fournisseur en nombre suffisant pour exercer une pression concurrentielle sur Apple.
Tous ces témoignages sont évidemment très précieux pour l'attaque d'Epic Games contre Apple, surtout que les juges apprécient les avis extérieurs de personnes qui n'ont aucun lien avec l'entreprise.
À voir comment cela va se dérouler, mais c'est loin d'être gagné aussi bien pour Apple que pour Epic Games.
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