Apple Silicon : la puce C1 couronne cinq ans d'indépendance technologique
Nadim Lefebvre
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Depuis l'abandon progressif des processeurs Intel en 2020, Apple mène une révolution industrielle à bas bruit. Le déploiement massif de ses puces sur mesure – des iPhone aux Mac en passant par les accessoires – constitue l'un des pivots technologiques les plus ambitieux de la décennie. Avec la puce réseau C1 qui équipe le tout dernier iPhone 16e, la firme de Cupertino consolide un écosystème matériel unique au monde.
Une intégration verticale sans précédent
La stratégie d'Apple repose sur un principe simple mais révolutionnaire : concevoir chaque composant critique en interne. L'aventure a débuté en 2010 avec l'A4, premier SoC maison équipant l'iPhone 4. En abandonnant les processeurs tiers, Apple s'est affranchi des contraintes imposées par ses fournisseurs.
Le tournant majeur s'opère en 2020 avec la transition vers Apple Silicon. Les puces M1, M2 puis M3 et M4, démontrent la capacité d'Apple à surpasser Intel en performance par watt. Les MacBook Air atteignent désormais 18 heures d'autonomie tout en offrant des performances supérieures aux PC premium. Ces puces sont également embarquées dans des iPad très fins et sans refroidissement, une prouesse qui aurait été impossible avec des puces Intel ou AMD.
L'intégration verticale permet des optimisations impossibles pour les constructeurs traditionnels. Quand Qualcomm doit concevoir des puces compatibles avec divers constructeurs et versions d'Android, Apple optimise simultanément le silicium et iOS. Cette symbiose matériel-logiciel génère des gains d'efficacité considérables, particulièrement visibles dans la gestion énergétique et les performances graphiques.
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Le C1, nouvelle pièce maîtresse de la stratégie silicium
Dans les laboratoires de Cupertino, les ingénieurs d'Apple ont reproduit l'exploit des puces Apple Silicon avec le modem C1. Ce composant de l'iPhone 16e combine une gravure en 4 nm pour le modem et 7 nm pour l'émetteur-récepteur, exploitant une architecture hybride inédite. Résultat ? Une efficacité énergétique qui propulse l'autonomie à 26 heures de vidéo, soit 18% de gain par rapport aux modèles équipés d'un modem Qualcomm.
Cette avancée s'inscrit parfaitement dans la stratégie globale d'Apple : après les processeurs A-Series pour iPhone, les puces M pour Mac et les H pour les AirPods, le C1 représente une nouvelle brique essentielle. L'objectif reste le même : maîtriser chaque composant critique pour offrir des performances supérieures tout en réduisant la dépendance aux fournisseurs externes comme Qualcomm.
C'est une stratégie qui a cours depuis longtemps. Apple a racheté la division modem d'Intel en 2019 uniquement pour créer ses propres puces réseau, et c'est un pari réussi pour l'instant. Depuis 6 années, des milliards ont été dépensés par Apple pour concevoir cette puce, preuve que la volonté d'indépendance n'a (presque) pas de prix. Le C1 ne fait que confirmer un fait : Apple cherche l'indépendance à tout prix et ne veut pas se fournir ailleurs.
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De plus, l'essai semble transformé pour Apple avec sa puce C1. Les premiers tests que l'on a faits sur l'iPhone 16e révèlent des performances aussi bonnes que les autres iPhone équipés de modems Qualcomm, voire meilleures dans certaines situations lorsqu'on est en mouvement. Les testeurs américains qui on pu avoir l'appareil entre leurs mains durant plusieurs jours font le même constat.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Apple a réussi a internaliser la conception des deux puces majeures d'un produit électronique : le SoC et la puce réseau, mais le travail n'est pas pas encore terminé.
Tout d'abord, si Apple sait concevoir des puces mais ne sait pas les fabriquer. Toutes les puces sont gravées par TSMC pour les plus complexes ou par le français STMicroelectronics pour d'autres. Apple, comme Nvidia ou AMD, adopte une stratégie dite "fabless" qui consiste à confier la fabrication des puces à d'autres, ce qui crée un intermédiaire supplémentaire. Evidemment, dans l'idéal Cupertino devrait tout faire en interne mais c'est complètement un autre métier.
En attendant, il reste d'autres composants majeurs à concevoir : les puces Bluetooth et Wi-Fi fabriquées actuellement par Broadcom, les capteurs photo fournis par Sony et évidemment les écrans construits par Samsung Display, LG et BOE. Le chemin est encore long vers l'indépendance complète, mais Apple est sans doute l'entreprise la mieux armée pour atteindre cet objectif.
La prochaine décennie pourrait voir Apple atteindre l'autosuffisance complète en silicium, depuis la conception jusqu'à l'assemblage final – un rêve que même Intel n'a jamais concrétisé. Cette verticalité extrême pose cependant des questions éthiques et réglementaires, l'UE examinant déjà les risques de position dominante.